l'invitu - la méditerranée en livres
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méditerranée en livres
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mise à jour de la page : 28/07/2007jean-claude
izzo
l'auteur :fils
d'un immigré italien et d'une mère d'origine espagnole née au panier, jean
claude izzo naît à marseille le 20 juin 1945. un cap de "tourneur-fraiseur"
en poche, il s'oriente tour à tour vers le militantisme dans pax christi (mouvement
catholique pour la paix), et la politique en adhérant d'abord au psu dont il est
un candidat malheureux, puis au pcf. il devient collaborateur puis journaliste
à "la marseillaise" tout en développant une activité méconnue mais prolifique
de poète dans les années 70 ("poèmes à haute voix", "terre
de feu", "etat de veille", "braises, brasiers,
brûlures"). devenu rédacteur en chef adjoint en charge de la rubrique
culture du journal, il continue de publier des poèmes ("paysage de femme",
"le réel au plus vif") tout en restant fidèle à son engagement
politique. ainsi, il publie en 1978 "clovis hugues, un rouge du midi"
chez j. laffite. déçu par le pcf, il se coupe brutalement de son passé et change
de cap dans tous les aspects de sa vie. s'ensuivent quelques années de galère
et après un passage à la "vie mutualiste" devenu "viva" dont
il devient rédacteur en chef en 1987 pôur end émissionner peu de temps après.
il participe à la création d’événements littéraires dont le carrefour des littératures
européennes de strasbourg, le festival du polar de grenoble et le festival etonnant
voyageur de saint malo, écrit également pour la télévision et le cinéma (les matins
chagrins, de jean-pierre gallèpe), puis choisist de se consacrer entièrement à
l'écriture (articles pour des revues, scénarii de film, textes de chansons, nouvelles
et bien sûr poésie). en 1995 il publie chez gallimard "total khéops",
premier volet d'une trilogie de série noire qui avec "chourmo"
(96) et "soléa" (98) lui vaut un grand succès populaire. en 1998
paraît « soléa » et malgré de fortes sollicitations de gallimard, il refuse de
poursuivre les aventures de fabio montale. ces trois livres, ainsi que "les
marins perdus" écrit en 97 et "le soleil des mourants"
sorti en septembre 1999 occultent par leur impact médiatique le reste de l'œuvre
de cet écrivain de grand talent qui fut avant tout un poête ("loin de
tous rivages" sorti en 1997 et réédité en 2000 en est un des meilleurs
exemples), et ce jusque dans ses romans les plus noirs. il faudra que la maladie
l'emporte le 26 janvier 2000 pour que l'on découvre l'étendue de son registre
littéraire et que l'on se rende enfin compte que jean-claude izzo était bien plus
que le très réducteur "écrivain de polars" forgé par les médias.total
kheopsmanu,
ugo et fabio : tel est le trio d'enfance du quartier du panier qui ouvre total
khéops, et puis lole... celle que tout le monde a aimé. mais manu a été abattu,
on ne sait ni trop par qui ni pourquoi, laissant lole seule et triste. ugo débarque
alors à marseille pour venger son ami. la mafia marseillaise serait derrière l'assassinat
de manu, alors ugo va abattre un des caïds de la pègre locale et tenter de se
faire oublier. il sera descendu par la police bienveillante qui passait par là...fabio
montale est le troisième larron du trio, celui qui a mal "tourné" :
il est devenu flic. un petit flic qui tente de faire son métier dans les quartiers
nord de la ville, là où le progrès social a quelque peu déserté et où la délinquance
fait partie de la routine. montale est bientôt rattrapé par ses amis de jeunesse,
disparus. il voudra savoir, pour lole, pour lui, pour la justice et l'amitié,
pourquoi ugo et manu sont morts.jean-claude izzo prend sa ville, marseille, à
bras le corps et nous décrit son cœur politique : la corruption, les liens "historiques"
du pouvoir et de la mafia ; on pense à "gaston", on pense à la famille
guérini... mais izzo est aussi un
amoureux de marseille, de sa vie, de ses gens, et quiconque s'engage dans sa lecture
se prend des envies de voyage, et d'aller voir sur place cette ville qui semble
si attirante dans les mots de l'auteur. malheureusement, l'avenir de marseille,
l'avenir du monde et des hommes et femmes qui vont avec rendent jean-claude izzo
pessimiste, alors le livre est sombre et la couverture noire... mais le talent,
la sensibilité, le style, font de ce roman un de ceux qu'on voudrait faire lire
à tout le monde, parce qu'il serait vraiment dommage de passer à coté. indispensable
! au-delà des histoires de flics, de truands, de mafia et de complot, izzo a tissé
la trame d'une amitié unissant trois gars, fils d'immigrants. une amitié tellement
forte qu'elle résistera au temps. À travers la disparition de deux d'entre-eux,
le troisième, le flic du trio, écrit le dernier chapitre de leur histoire de vie
pour que, justice se faisant, un certain baume apaisant vienne cicatriser les
blessures, enlever les gales pourrissantes et donner un léger souffle d'espoir
aux suivants.
chourmola
suite de cette trilogie noire consacrée à marseille le titre de ce roman a été
emprunté au groupe de rap marseillais iam, digne représentant de la cité phocéenne.le
retour de fabio montale qui a démissionné de la police parce qu'on ne peut pas
être un flic honnête de gauche à marseille... il profite de sa retraite prématurée
dans sa maison des goudes, face à la méditerranée, savourant son lagavullin en
écoutant coltrane, entre deux parties de pêche à bord de son "pointu".mais
cette douce quiétude est bien vite dérangée par l'arrivée de sa cousine angèle,
dont le fils guitou a fugué et a rejoint marseille pour retrouver sa petite amie
naïma. angèle est sans nouvelle, et ne voudrait pas que cette fugue fasse
dégénérer les rapports déjà difficiles qu'entretiennent son nouvel ami, le beau-père,
et son fils. d'autant
que ces rapports se sont encore assombris lorsque le premier a appris que naïma
était d'origine algérienne. fabio montale va mener son enquête, qui l'entraînera
dans le milieu maghrébin.jean-claude
izzo poursuit sa chronique de la vie marseillaise et s'attarde cette fois sur
une plaie qui la ronge : le racisme. les extrémistes sont de tous les bords, les
racistes de même, et la politique, comme partout, mais peut-être ici plus qu'ailleurs,
n'est pas en reste.montale
(comme izzo ?) comptait goûter les joies de la retraite, mais la réalité le poursuit
de sa noirceur. il n’est plus dans la police et ne peut compter que sur lui-même
et les quelques contacts qu’il a gardés dans la police et le milieu.ce
second roman est encore plus sombre que le précédent. c'est la résignation et
le fatalisme qui dominent. soleadans
solea (titre emprunté à miles davis),. jean-claude
izzo explore et dissèque la vie marseillaise.fabio
montale, qui a quitté la police après total khéops pour avoir trop vu la corruption
qui régnait dans les rangs du pouvoir, qui s'est confronté aux extrémismes de
tous bords liés à la présence de l'extrême droite, du front national, de l'islam
radical et d'un fort contingent maghrébin dans la ville et la région (cf. chourmo),
tente de se réadapter à la vie "normale" dans sa maison des goudes,
à l'abri de toute noirceur. mais
trop de magouilles, trop de morts ont meurtri son âme, broyé ses espérances.fabio
montale doit retrouver une ancienne amie et journaliste d’investigation babette
qui enquête sur les liens douteux mais tangibles qui unissent la haute finance
internationale et la mafia italienne et marseillaise.lorsqu'il
se retrouve en possession des dossiers de babette où sont étalées les preuves
des liens recherchés par la journaliste, preuves que la dite mafia entend bien
faire disparaître, les choses se gâtent, forcément...jean-claude
izzo poursuit la sombre description de la vie politique marseillaise, et le constat
qu'il en fait est des plus pessimistes. fabio montale est rongé de l'intérieur
et s'enfonce dans la déprime, au point qu'il ne sortira pas vivant de cette "aventure".
on pense bien sûr au parallèle avec la santé de l'auteur qui, atteint d'un cancer,
allait décéder quelques dix-huit mois après la parution de ce roman. total kheops, chourmo, soleagallimard
(série noire), 1995, 1996, 1998 fabio montale vu par jean-claude izzo "j'ai
écris le premier (total kheops) sans savoir que j'allais en écrire un deuxième.
en revanche, je savais que je n'en écrirais pas cinquante. en entamant solea,
je prévoyais d'en finir avec fabio montale(...) il y a un peu de moi en lui évidemment.
des choses personnelles, des valeurs: le plaisir de manger, ou de boire du bon
vin, par exemple. mais j'ai horreur de la pêche, par contre... je n'ai jamais
été flic. tous les personnages sont inventés. mais inspirés d'amis... le seul
vrai, c'est hassan, le patron du " bar des maraîchers ". et les jeunes,
c'est mon fils et sa bande de copains. difficile d'analyser mon succès. je ne
pense pas être un écrivain consensuel. il y a un certain nombre de gens qui ne
me liront pas... je ne fais pas de concessions, ni dans le fond ni dans la forme.
je crois que les lecteurs se retrouvent dans le personnage de fabio montale, et
dans ce que disent mes romans: y compris les problèmes de couple, l'amitié. chacun
trouve dans montale l'ami qu'il cherchait (...) on me dit souvent que c'est noir
et pessimiste, mais le plus beau compliment que l'on me fait régulièrement, c'est
de dire que, lorsqu'on referme solea, on a une putain d'envie de vivre ! je suis
touché, car c'est la sensation que ça me fait quand je lis jim harrison (...)
oui, comme montale, je suis pessimiste. l'avenir est désespéré. mais c'est pas
moi qui suis désespéré, c'est le monde... je dis qu'on peut résister, transformer,
améliorer, mais de toute façon on est coincé. on ne peut rien changer fondamentalement.
par contre, dans l'espace qu'on a, on peut être heureux". "
je ne crois plus les politiques qui me disent: demain ça ira mieux, ou la révolution
va tout changer. (...) tout ce que j'écris sur les implications de la mafia dans
la région paca est vrai. mon passé de journaliste doit y être pour quelque chose...
(...) ecrire des polars n'est pas une autre façon de militer. c'est juste une
manière de faire passer mes doutes, mes angoisses, mes bonheurs, mes plaisirs.
c'est une manière de partager. bon, à l'exception de l'opposition au front national,
je n'ai pas à dire: il faut faire ceci ou il faut faire cela. je raconte des histoires.
tant mieux si cela donne à certains l'envie d'intégrer une association. montale,
il n'appartient à aucun parti. il a des valeurs. il doute. il est solitaire. mais
il croit à un certain nombre de choses. " en tant que citoyen, en tant que
militant, je n'ai plus grand espoir. mais je conserve plein d'espérance vis à
vis de l'homme(...) tuer montale (dans solea), c'est un signal d'alarme. s'il
représente l'espoir, ça veut dire que, si vous voulez d'autres montale, il faut
vous démerder... " les
marins perdusizzo
a longtemps traîné sur les docks du port de marseille ; là lui est venue l'idée
de nous conter l'histoire de ces marins perdus, abandonnés au bout du monde, le
plus souvent sur leur cargo vieillissant affublé d'un pavillon de complaisance."j'ai
appris la mer comme ça. c'est comme ça que la littérature s'est mise à avoir un
sens. enfin, celle qui est capable de nous raconter qu'il y a des mers dans lesquelles
on pourra jamais se baigner, des ports où l'on pourra pas baiser de filles. et
des pays qui survivront à la connerie humaine."sur
l'aldébaran, vieux cargo amarré à la digue du large, trois hommes : abdul, diamantis
et nedim, attendent désespérément que leur sort se décide à des centaines de kilomètre
de là . désoeuvrés,
ils découvrent en errant au hasard dans marseille, une vie qui leur semble familière,
comme en écho de leur propre passé et une ville qu'ils déchiffrent peu à peu dans
ce qu'elle a de plus douloureux et qu'ils apprennent à aimer presqu'autant qu'à
haïr. autour d'eux,
marseille tisse et dénoue inlassablement sa toile de fond dans un tourbillon lent
d'espoirs déçus, de joies simples, de patiences trompées, d'élans contenus, de
souvenirs tenaces, de violences sourdes et de plaisirs assouvis. ils y partagent
leurs souvenirs et leurs doutes. un drame moderne se noue autour de ces trois
protagonistes, dont seul le dénouement tragique leur révèlera qui ils sont. la
mise en scène impeccable de ce sombre huis clos donne au roman une dimension noire
et tendre, violente comme peut l'être la lumière en méditerranée. les
marins perdus n'est pas un polar, mais jean-claude izzo disait lui-même que
ce qui lui importait était le travail sur le réel, et que parfois il passait par
la fiction policière pour étayer son propos, d'autres fois non. selon lui, il
n'y a pas de différences entre les genres, alors je me suis permis de glisser
ce roman au côté de la trilogie noire et marseillaise de fabio montale.jean-claude
izzo, bien qu'amoureux de sa ville, et sûrement à cause de cette passion, fait
toujours le même constat amer : l'avenir de marseille est bien sombre... comme
peut l'être celui de ces trois marins qui vivent à travers leurs souvenirs (comme
marseille ?). beaucoup de tendresse cependant envers ces personnages et ceux rencontrés
sur le port, dans la ville, au hasard des errances. une parenthèse pas si éloignée,
entre deux romans noirs... "les
marins perdus" est un livre fort, aussi fort que les personnages qui
l'habitent et le théatre de son action. un livre sur le courage, la futilité,
la peur et le doute dont le titre aurait pu être "dans le port de marseille",
tant son atmosphère est proche de la chanson de jacques brel, "pleine de
bières et de drames aux premières lueurs". le
soleil des mourants rico,
plaqué par sa femme, délaissé par son fils, viré par son employeur, se retrouve
dans le métro à dormir entre deux cartons. comment a-t-il pu descendre si bas?
c'est ce que tente de comprendre notre antihéros alors qu'il entreprend son voyage
vers marseille pour «aller mourir au soleil». de banc de gare en squat glauque,
il revoit sa vie et sa déchéance partagée avec d'autres vaincus de la vie: titi,
le copain moribond de la station ménilmontant; abdou, l'algérien brûlé au visage
alors qu'il tentait d'entrer clandestinement en france; mirjana, la prostituée
bosniaque cassée par la guerre... "le
soleil des mourants " est un roman qui n'est pas purement imaginaire comme
le dit izzo. l'auteur s'est inspiré de reportages, d'enquêtes et d'entretiens
publiés dans les journaux.
la lente dérive de rico nous fait sentir le poids de cette misère physique et
morale, de cette déchéance. " ne plus vouloir revenir dans cette société,
ce n'était pas de l'impuissance. seulement une grande fatigue à vivre après tant
d'heures et d'heures de misère. " lorsqu'il rencontre abdou, un gamin
qui a fui l'algérie après l'assassinat de ses parents et de son frère, il est
à bout de souffle, avec l'espoir insensé de retrouver léa, l'amour de ses 20 ans…
les lieux favoris de fabio montale chez
hassan, bar des maraîchers, à la plaine le
bar de la marine, quai de rive neuve, sur le vieux-port la
samaritaine, sur le vieux-port chez
ange, place des treize-coins le
bar des treize coins, rue saint-françois chez
félix, rue caisserie (le chaudron provençal) chez
paul, rue saint-saëns chez
mario, place thiers la musique de fabio dans
total kheops: ray
charles: "what 'i'd say", "i got a woman" (concert de newport)
miles
davis: "rouge" thelonious
monk calvin
russel: "rockin' the republicans", "baby i love you" i
am paco
de lucia, django reinhardt, billie holiday, ruben bladeslightin'
hopkins: "last night blues" bob
marley: "stir it up" paolo
conte michel
petrucciani: "estate" astor
piazzola avec gerry mulligan: "buenos aires, twenty years after" buddy
guy avec mark knopfler, eric clapton et jeff beck: "damn right, he's got
the blues"dizzy
gillespie: "manteca" leo
ferré (chez hassan , bar des maraîchers) dans
chourmo bob
dylan: "nashville skyline", "girl from the north country"john
coltrane: "out of this world" miles davis bob
marley: "so much trouble in the world" ray
barreto: "benedicion" lili
boniche los
chunguitos art
pepper: "more for less" sonny
rollins : "without a song" lightin'
hopkins: "your own fault, baby, to treat me the way you do" edmundo
riveiro: "garuffa" carlos
gardel: "volver" zz
top: "thunderbird", "long distance boogie", "nasty dogs
and funky kings" dans
solea miles
davis: "solea" mongo
santamaria: "mambo terrifico" pinetop
perkins: "blue after hours" lightnin'
hopkins: "darling do you remember me?" abdullah
ibrahim: "zikr" (echoes from africa) fonky
family, le troisième oeil nat
king cole avec anita o'day: "the lonesome road" gian
maria testa: "extra-muros" ruben
gonzalez: "amor verdadero", "alto songo", "los sitio'
asere", "pio mentiroso" les livres de fabio "en
marge des marées", "lord jim" de joseph conrad "grand
hotel des valises", de christian dotremont "exil",
de saint-john perse les
poètes marseillais: emile sicard, toursky, gérald neveu, gabriel audisio, et louis
brauquier, le préféré de montalebibliographie
de jean-claude izzo :poèmes
à haute voix (p.j. oswald, 1970)terres
de feu (p.j. oswald, 1972) etat de veille (p.j. oswald, 1974) paysage
de femme (guy chambelland, 1975) le réel au plus vif (guy chambelland, 1976)
clovis hughes, un rouge du midi (j.laffitte, 1978) (réédition 2001 j. laffitte)
total kheops (gallimard, série noire, 1995) (réédition 2001 folio) chourmo
(gallimard, série noire, 1996) (réédition 2001 folio) loin de tous rivages
(ed. du ricochet, 1997) (réédition 2000 ed librio) les marins perdus (flammarion,
1997) (réédition 1998 ed. j’ai lu) solea (gallimard, série noire, 1998) (réédition
2001 folio) vivre fatigue (librio, 1998) l’aride des jours (ed. du ricochet,
1999) (réédition 2000 ed librio) le soleil des mourants (flammarion, 1999)
(réédition 2000 ed. j’ai lu) laurent
gaudé romancier
et dramaturge né e 6 juillet 1972 à paris 14e, laurent gaudé a
étudié le théâtre et a publié chez actes sud plusieurs pièces de théâtre :
combats de possédés (1999), onysos le furieux (2000), pluie de
cendres (2001), cendres sur les mains (2002), le tigre bleu de l'euphrate
(2002), salina (2003), médée kali (2003), les sacrifiées
(2004), l'annulaire (in les cinq doigts de la main, 2006) et quatre romans
: cris (2001), la mort du roi tsongor (2002, prix goncourt des
lycéens 2002, prix des libraires 2003), le soleil des scorta (2004, prix
goncourt 2004, prix jean-giono 2004), eldorado (2006) et dans la nuit
mozambique (2007).theatreonysos
le furieux (2000)un homme est
là, assis sur le quai d’un métro, à new york. il est vieux. en guenilles. c’est
onysos. mi-homme, mi-dieu, il prend la parole
et entame le récit de sa vie. c’est une épopée antique. de sa naissance dans les
monts zagros à la prise de babylone, de sa fuite en egypte à son arrivée dans
la cité d’ilion où il décide de mourir au côté des troyens, il raconte une longue
succession de pleurs et de cris de jouissance, de larmes, d’orgies et d’incendies.le
temps d’une nuit, sur ce quai anonyme, onysos le gueux, le boueux, onysos l’assoiffé
fait à nouveau entendre sa voix et se rappelle à la mémoire des hommes.pluie
de cendres (2001)c’est le siège
d’une ville. bombardements. asphyxie. incendies. il pleut sur les maisons. une
pluie de cendres qui embrase le ciel et ensevelit les décombres.les
habitants savent que la fin est proche et la défaite inéluctable. tout le monde
continue à vouloir se battre, sous les yeux de korée, le regard de la ville, pour
ne rien céder à l’ennemi. tout le monde, sauf ajac, l’amant de korée. lui ne prend
pas part au combat. il ne porte pas d’arme. il rôde la nuit, dans les ruines,
arpentant les rues, creusant dans les gravats. il a décidé que cette ville ne
lui était rien et que son combat était ailleurs. il a décidé qu’il soustrairait
celle qu’il aime à l’incendie.les
sacrifiées (2004)raïssa est une
jeune fille qui vit dans les collines de la campagne algérienne. elle est maudite.
sa mère est morte en couches. elle porte en elle cette faute originelle. a travers
trois générations de femmes (raïssa, léïla et saïda), à travers trois époques
différentes de l'histoire de la france et de l'algérie, la malédiction se perpétue.
elle se décline sans cesse sous un nouveau visage: la guerre, l'émigration, la
montée du fanatisme. la lignée de raïssa traverse ces tourmentes. chacune de ces
femmes lutte contre l'histoire, essayant d'échapper aux coups du sort qui renversent
tout. chacune, tour à tour, pousse le cri de révolte et de combat des sacrifiées.
romanscris
(2001)ces cris,
ce sont ceux que lancent douze poilus - marius, boris, ripoll, rénier, barboni,
m'bossolo… - de la guerre de 1914 du fond de leurs tranchées. ce sont ceux, insoutenables,
du soldat gazé, agonisant à quelques mètres de là. ou encore ceux, obsédants,
poussés jour et nuit par l’« homme-cochon », un soldat fou qu’ils imaginent errant,
tel un esprit prisonnier du purgatoire, entre les deux lignes de front. dans les
tranchées où ils se terrent, dans les boyaux d'où ils s'élancent selon le flux
et le reflux des assauts, ils partagent l'insoutenable fraternité de la guerre
de 1914. a l'arrière, jules, le permissionnaire, s'éloigne vers la vie normale,
mais les voix de ses compagnons d'armes le poursuivent avec acharnement. elles
s'élèvent comme un chant, comme un mémorial de douleur et de tragique solidarité.
dans ce texte incantatoire, laurent gaudé nous plonge dans l'immédiate instantanéité
des combats, avec une densité sonore et une véracité saisissantes. un livre distingué
par le prix atout lire 2001.au fil des pages,
les monologues intérieurs de ces douze compagnons d’armes vont se succéder, pour
s’élever en une sorte de chant polyphonique, de prière incantatoire contre la
barbarie et l’absurdité de la guerre. terrés dans leurs tranchées, ils vont, tour
à tour, dire leur quotidien, rythmé par les assauts, mais aussi par leurs peurs
et leurs douleurs. la mort n’est jamais loin, même pour jules, le permissionnaire
qui a la chance de quitter le front pour quelques jours, mais qui reste obsédé
par les voix de ses compagnons de galère. j’ai
lu cris, premier roman de laurent gaudé, après le
soleil des scorta, et j’ai été très surpris car le style en est très différent.
ici le style épuré évite tous les excès du genre, pas de pathos inutile, de mélodrame
dégoulinant ou d’héroïsme déplacé. gaudé emmène son lecteur avec ses personnages
dans le chaos des tranchées et lui fait éprouver -littéralement- la peur qui noue
le ventre en permanence, la terreur à la pensée de mourir, l’angoisse de n’avoir
d’autre choix que de devoir tuer pour survivre. un livre qui empoigne le lecteur
dès la première page.la
mort du roi tsongor (2002)dans
une antiquité imaginaire, le vieux tsongor, roi guerrier de massaba, souverain
d'un empire immense, souhaite finir en paix,
et marier sa fille, la belle samilia, au fils du roi des terres du sel, kouame,
tout aussi beau et noble qu'elle. mais ce que le roi tsongor ne sait pas, et que
sa fille samilia avait oublié, c'est qu'elle s'était promise, adolescente, à sengo
kerim, un orphelin élevé avec les enfants du roi, et parti à l'adolescence conquérir
armée et territoire par ses propres moyens, comme l'avait fait le jeune tsongor
à la mort de son père.et la veille du mariage princier, sengo kerim revient
revendiquer ses droits sur la belle princesse. et la guerre éclate.
le monarque s'éteint ; son plus jeune fils s'en va parcourir le continent pour
édifier sept tombeaux à l'image de ce que fut le vénéré - et aussi haïssable -
roi tsongor. récit
épique et initiatique, shakespearien par certains côtés, le roman
de laurent gaudé déploie une langue enivrante pour décrire l'épopée d'une vie,
voire d'une génération, d'une civilisation. en refermant ce livre, on reste hanté
par cet univers, qui marie avec bonheur la tragédie antique et la culture africaine
ancestrale. le soleil des scorta
(2004)ce roman est une saga familiale
plantée à montepuccio, village des pouilles, dans le sud de l'italie, de 1875
à nos jours. cette lignée terrible marquée dès
son origine par le sceau de la malédiction, puis par celui de la pauvreté, transmettra,
de père en fils, la fierté indomptable, la démence et la rage de vivre de la famille scorta. rocco
scorta mascalzone, bâtard, voleur et assassin comme son père, terrorise la région
avant de se marier à une muette dont il aura trois enfants. guettés par la misère
et la folie, les trois enfants tentent d'émigrer aux etats-unis puis, refoulés
d'ellis island, reviennent au village pour y ouvrir un tabac et essayer, malgré
l'adversité, de trouver un peu de bonheur et d'argent,un sens à leur vie et une
raison d'être à leur clan. le
soleil des scorta est une histoire d'ombre et de lumière, qui conte les racines
et la transmission, la folie des hommes, la lutte pour la vie, le châtiment, les
moments de bonheur, le combat contre la malédiction de la terre, de la fin du
xixe siècle jusqu'aux années 1980. un roman sincère, profondément humaniste, lumineux,
tantôt rouge sang, tantôt jaune soleil. la « lignée des mangeurs de soleil » transfigure
la geste de la famille des pouilles en la dotant d'une aura mythique. une
plume sûre, précise, évocatrice, un récit simple et efficace, dans lequel on plonge
avec plaisir. découpé comme une pièce de théâtre, ce roman prend le double aspect d'un récit objectif et linéaire
que viennent scander les soliloques d'un des personnages, qui, avant de perdre
la mémoire, se hâte de confier à l'ancien curé ce qu'il n'a pu encore raconter
à personne. marqué par la force de la parole, par la sincérité des personnages,
par l'humilité et l'obstination des gens simples, par la recherche et la connaissance
des joies élémentaires, ce livre entrelace les destins comme les voix d'un hymne
étincelant d'humanisme.eldoradogardien
de la citadelle europe, le commandant piracci navigue depuis vingt ans au large
des côtes italiennes, afin d'intercepter les embarcations des émigrants clandestins.
mais plusieurs événements viennent ébranler sa foi en sa mission. son rôle consiste à sauver les malheureux abandonnés
en pleine mer par des passeurs malveillants. après les avoir sauvés,
il les remet à la police. il fait son travail consciencieusement, sans trop se
poser de questions, jusqu'au jour où une femme l'interpelle et lui demande une
faveur. "elle le voulait. de tout son être. combien de fois dans ta vie,
salvatore, as tu vraiment demandé quelque chose à quelqu'un ? nous n'osons plus.
nous espérons. nous rêvons que ceux qui nous entourent devinent nos désirs,
que ce ne soit même pas la peine de les exprimer. nous nous taisons. par pudeur.
par crainte. par habitude."la
rencontre avec cette femme déclenche chez piracci une quête. une
quête de sens.dans la nuit mozambiquedans
ces quatre récits qui composent dans la nuit mozambique, écrits entre
1998 et 2007 en marge de ses romans et pièces, et où l'on retrouve des échos de
ceux-là, laurent gaudé fait preuve d'une maîtrise et d'une sobriété remarquables.
le texte bref lui convient, son style se resserre, les personnages et les lieux
prennent une intensité nouvelle. gaudé
nous convie ici à écouter des histoires d'hommes perdus, malheureux et solitaires,
de baroudeurs qui ont posé sac à terre, de soldats écœurés par la guerre, d'amoureux
dont les aventures se sont mal terminées. il y met toute sa sensibilité, tout
son talent. la plupart des histoires
sont racontées par les protagonistes eux-mêmes, ou présentées comme des faits
qui leur ont été rapportés et qu'ils nous communiquent à leur tour. ces nouvelles
permettent de retrouver la profonde humanité qui caractérise l’œuvre de gaudé.sang
négrier est un récit à la limite du fantastique où un esclave échappé du
navire qui doit l’emporter vers les amériques terrorise la ville de saint-malo
et les responsables de ce transport inique. le second du navire "promu
par les aléas du sort", la mort du capitaine, provoque un désastre en
décidant de ramener le corps du capitaine à saint-malo. il ne s'en remettra pas.
c’est lui qui raconte, dans un style épuré, presque clinique, la nuit de chasse
à l’homme lancée par les autorités un point de vue qui glace le sang. "le
colonel barbaque" raconte magistralement la dérive africaine d'un rescapé
de la grande guerre, qui n'a pas pu "revenir des tranchées",
et a fui vers "la terre rouge d'afrique", où, dit-il, "je
me suis senti chez moi. etranger à tout mais sur une terre qui me faisait du bien".
cet officier français, quentin ripoll, « devenu noir» dans la boucherie
des tranchées en 14-18 aux côtés de ses tirailleurs africains, et qui décide de
partir s'installer au mali, y fait d'abord du trafic, puis devient une espèce
de chef de guerre qui, aux côtés des autochtones, combat ses compatriotes des
troupes coloniales,. on retrouve les conséquences
des horreurs de la guerre évoquées dans cris, avec des accents qui peuvent
évoquer le céline de voyage au bout de la nuit. dans
"gramercy park hotel", un vieux poète juif, moshe s. carvicz,
victime d’une agression, erre dans new york au retour de l’hôpital,à la recherche
de sa mémoire, après "trente ans d'oubli". il retrouve la chambre
d'hôtel où sa femme ella et lui s'aimèrent avant que celle-ci sombre dans une
folie profonde et dangereuse. ici, le style de gaudé, son humanité, sa sensibilité
toute en mélancolie, en plaintes douloureuses, touchent droit au coeur. c’est
bouleversant sans sensiblerie, sans nostalgie facile pour autant. "dans
la nuit mozambique", qui donne son titre au livre, évoque trois officiers
de marine portugais qui ont pris l'habitude de se retrouver dans un restaurant
ami de lisbonne, pour des rendez-vous réguliers. ils soupent, boivent beaucoup,
et se racontent des histoires, vécues ou imaginaires. leur dernière assemblée
remonte à 1978. les nappes, pieusement conservées par le patron, en attestent
le souvenir. le dernier survivant de la bande, l'amiral de medeiros, revient donc
chez fernando une ultime fois pour se remémorer le récit tragique du commandant
passeo, tombé amoureux, au mozambique, d'une « fille de tigirka ». les
deux hommes se souviennent de leurs deux amis disparus, marins, et de leur dernière
rencontre à quatre, en 1978, quand le commandant passeo a évoqué ce moment où
il faisait route vers maputo : "dans cette nuit qui sentait la noix de
cajou et le sel marin, une femme était morte. je n'avais jamais pensé que mon
bateau se transformerait un jour en cercueil." passeo avait décidé de
donner une sépulture à cette femme, au mozambique. mais il raconterait "tout
cela la prochaine fois". passeo n'est pas revenu, il a laissé ses amis
avec une énigme et une obsession, le mozambique. et laurent gaudé, très habilement,
abandonne ses lecteurs avec la même interrogation.avec
dans la nuit mozambique, le talent de conteur de laurent gaudé éclate
littéralement. ces dernières pages sont extraordinaires par leur imagination et
leur rythme d'écriture. retour
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